Des chrétiens proches du pôle évangélique

 

Les Témoins de Jéhovah n’ont pas qu’un simple style religieux protestant. Tout chez eux les identifient à des protestants au sens historico-sociologique du terme :

 

- Les origines de leur mouvement : une fondation au XIXème siècle en Pennsylvanie [1] par un écosso-irlandais presbytérien-congrégationaliste,

 

- Leurs croyances : références systématiques à la Bible en matière de foi et de vie chrétienne - Sola scriptura, refus de la papauté, du culte de Marie et des saints, de la croix latine -symbole de l’Église catholique, des dogmes de l’Immaculée Conception, de l’Assomption mais aussi de la Trinité, sans fondement biblique -Restitution du christianisme, affirmation du don (kharisma) gratuit du salut – Sola gratia avec l’amendement apporté par Saint Jacques sur les œuvres indispensables à la foi,

 

- Leurs pratiques : piété personnelle, étude individuelle de la Bible, observance de pratiques collectives, participation régulière et très élevée au culte hebdomadaire, place centrale de la prédication, en chaire et dans le cadre d’une activité d’évangélisation domiciliaire systématique dévolue à chaque Témoin [2]sacerdoce universel des croyants,[3] refus d’une conception sacrale du clergé, le baptême d’adultes par immersion –baptisme,[4] inutilité de la confirmation, la Sainte Cène pratiquée une fois l’an comme mémorial de la Passion du Christ selon la tradition Zwinglienne – refus de la doctrine de la transsubstantiation,

 

- L’organisation de leurs congrégations locales : comme nous l’avons dit plus haut, leurs pasteurs (anciens, du grec presbyteroï) sont des laïcs bénévoles qui exercent pour vivre une activité salariée, sont souvent mariés et pères de famille, bénéficient d’une formation interne longue et continue, assurent les cultes  mais aussi les différents actes cultuels (baptêmes, mariages, enterrements)[5], animent différentes activités (études bibliques en groupe, visites des malades et des isolés), représentent leur congrégation à l’extérieur, agissent sans hiérarchie au sein d’un conseil presbytéral (collège des anciens)[6] pour la direction de la congrégation locale, assument pour certains d’entre eux des ministères spécialisés – construction de lieux de culte / salles du Royaume, soutien particulier aux malades hospitalisés, activités dans le domaine des médias, d’autres encore, peu nombreux, assument leur ministère à plein temps dans le cadre de l’organisation du culte au niveau régional.[7]

 

La comparaison entre les croyances et les pratiques du protestantisme et celles des Témoins de Jéhovah démontre leur appartenance bon gré mal gré au monde protestant. L’analyse comparative de la Discipline et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de L’Église Réformée de France - ERF, avec la constitution et le fonctionnement du Culte des Témoins de Jéhovah présentés dans Organisés pour faire la volonté de Jéhovah [8] le confirme encore.

 

La confession jéhovéenne répond bien aux critères principaux du protestantisme et l’on peut donc à bon droit lui appliquer les concepts wébériens sur le protestantisme et la société explicités dans L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme particulièrement dans sa partie II intitulée Les sectes protestantes et l’esprit du capitalisme[9] ainsi que dans Économie et société – L’organisation et les puissances de la société dans leur rapport avec l’économie surtout dans son chapitre V Les types de communalisation religieuse (sociologie de la religion).[10]

 


[1] « (…) le quaker William Penn (1644-1718), [expérimente] des fonctionnements démocratiques en avance sur [son] temps( …) en fondant la Pennsylvanie, un État très tolérant et pacifique dont la Constitution servira  de modèle à celle des États-Unis. C’est sous la poussée des baptistes et des presbytériens (calvinistes) que le Premier amendement à la Constitution Américaine fut adopté en 1791. Tout en instituant la liberté de parole et de presse, il proclamait la liberté religieuse et une stricte séparation des Églises et de l’État (…). Les vagues d’immigration qui suivirent  aux XVIIIe et XXe siècles amèneront en Amérique d’autres populations protestantes : (…) des presbytériens écossais d’Irlande du Nord (…). Les mouvements de réveils, qui, à l’aide d’une organisation efficace, visent la conversion du cœur et la revitalisation religieuse, ont profondément marqué la mentalité américaine. » Willaime J.P, Protestantisme, Histoire des religions, Besançon, Paris, CRDP Franche-Comté / Cerf, 1998, chapitre IV, Le protestantisme américain, pp. 70-71.

[2] « L’Église réformée de France participe à la mission que le Seigneur confie à l’Eglise universelle, annoncer, servir et vivre l’Évangile auprès de tous les hommes. Par leur baptême, tous les membres de l’Église sont appelés à prendre part à cette mission. Pour les former et les fortifier à cette fin et pour concourir à l’annonce de l’Évangile, l’Église réformée de France discerne et reconnaît, dans le cadre des Églises locales et dans celui de l’union des Églises, des ministères et des ministres divers que le Seigneur lui donne.» DISCIPLINE et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de l’Église Réformée de France –ERF, Titre III – Des ministères, des ministres et des postes, Article onze– Des ministères et des ministres, § 1, janvier 2005.  

[3] « L’Église réformée de France a pour raison d’être d’annoncer au monde l’Évangile. Elle est donc ouverte à toute personne qu’elle appelle à croire en Jésus-Christ, à approfondir sa foi par la lecture de la Bible et l’écoute de la prédication, à recevoir le baptême s’il ne lui a pas déjà été donné et à participer à la Sainte Cène. » DISCIPLINE et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de l’Église Réformée de France –ERF, Titre I – De l’Église locale et de l’association culturelle, Article premier – Des membres, § 1, janvier 2005.

[4] « Pour que le sens du baptême soit clairement affirmé, il devra en principe être administré dans une assemblée de l’Église. Si des circonstances particulières, dont le conseil presbytéral sera juge, conduisent à célébrer le baptême en dehors d’un culte de la communauté, la présence de celle-ci devra être marquée par la participation d’au moins un ou deux conseillers presbytéraux ou membres de l’Église, en dehors de la famille de l’enfant ou de l’adulte appelé à recevoir le baptême. » DISCIPLINE et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de l’Église Réformée de France –ERF, Titre II – Des cultes et de la catéchèse, Article six– Du baptême et de la présentation, § 5, janvier 2005. 

[5] «  Les baptêmes, présentations et bénédictions de couples à l’occasion de leur mariage doivent être précédés d’au moins un entretien au cours duquel le pasteur, ou le titulaire d’un mandat, lit et commente pour les intéressés les passages essentiels, notamment les engagements, de la liturgie correspondante et en fait apparaître la signification. Dans le cas où le pasteur, ou le titulaire du mandat, acquerrait la conviction que certains des intéressés ne sont pas en mesure de prendre les engagements requis, si le respect du secret professionnel l’y autorise, il sollicitera l’avis du conseil presbytéral, ou celui du président du consistoire, auprès duquel les intéressés peuvent toujours porter appel contre un refus. Chaque baptême, présentation, bénédiction de mariage ou service funèbre est immédiatement inscrit sur le registre spécial par celui qui a présidé l’acte liturgique. »DISCIPLINE et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de l’Église Réformée de France –ERF, Titre II – Des cultes et de la catéchèse, Article cinq– Des cultes, § 1, janvier 2005.    

[6] « Les membres de l’Église qui désirent être membres de l’association cultuelle, et par là même avoir droit de vote dans les assemblées générales, doivent en faire la demande écrite au conseil presbytéral qui décide de leur inscription sur la liste des membres de l’association cultuelle. Ceux qui sont ainsi inscrits sont appelés à contribuer au gouvernement de l’Église, à participer fidèlement au service de l’Évangile et à la vie matérielle et financière de l’Église. Cette liste est tenue à jour par le conseil presbytéral, qui la révise tous les ans au cours du dernier trimestre. Inscription et maintien sur cette liste relèvent de la responsabilité et du discernement du conseil presbytéral. Refus d’inscription ou radiations sont susceptibles d’appel devant le conseil régional. »  DISCIPLINE et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de l’Église Réformée de France –ERF, Titre I – De l’Église locale et de l’association culturelle, Article premier – Des membres, § 2, janvier 2005. 

[7] «  L’inscription d’un poste de circonscription dans une association cultuelle est décidée par le conseil national, sur la demande du conseil régional concerné. »  DISCIPLINE et Règlement général d’application d’articles de la Discipline de l’Église Réformée de France –ERF, Titre III – Des ministères, des ministres et des postes, Article dix huit– Des postes, § 4, janvier 2005.

[8] Organisés pour faire la volonté de Jéhovah, WTBTS of Pennsylvania, Éditions les Témoins de Jéhovah de France (association 1901), Boulogne-Billancourt, 2005.

[9] Weber M., L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, traduction inédite et présentation par Isabelle Kalinowski, Paris, Flammarion, 2000, p. 305-342. 

[10] Weber M., Économie et société/ 2, L’organisation et les puissances de la société dans leur

rapport avec l’économie, Paris, Plon, Agora Les classiques, collection dirigée par François

Laurent, 1995, Paris, éditions Pocket, 1995, pp. 145-409.

 

Référence universitaire pour citer cet article :

- Barbey Ph., Les Témoins de Jéhovah : Des chrétiens proches du pôle évangélique, Focus sociologique, consulté le [date].

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